Jean Van Hamme s’essaie au préquel, en créant une mini-série de 3 tomes pour raconter les origines du célèbre héros Largo Winch… né Largo Winczlav. Le premier tome de cette trilogie suit les (més)aventures de Vanko Winczlav, jeune médecin monténégrin, ancêtre de notre milliardaire en blue jeans.
Ça commence très bien : Vanko est un héros à forte personnalité, aux prises avec les Ottomans dans des Balkans qui se déchirent, au XIXe siècle... Mais de rebondissements en rebondissements, Van Hamme nous perd peu à peu... Notre puis nos héros enchaînent les péripéties mouvementées et passent du coq à l'âne, de l'Europe aux États-Unis, et de New York au Far West... Tout va trop vite, même si le scénario se tient. C’est juste qu’il y avait matière à faire un récit encore plus ample, plus posé, qui nous aurais permis de savourer les séquences avec Vanko notamment, qui reste de loin le personnage le plus intéressant.
Si l'on ajoute à cela des passages assez racoleurs, on ne peut qu'être un peu déçu face à un scénario plutôt moyen pour un Van Hamme... Certes, on ne s'ennuie pas une seconde et l'auteur belge a bien plus de talent que beaucoup de ses contemporains. Mais je regrette que ses tics de narration prennent le pas sur l'audace ou l'originalité, et que le départ en fanfare ne tienne pas toutes ses promesses.
En fait, plus qu’à la série « Largo Winch » qu’il est supposé annoncer, cet album me fait penser à la saga « Les Maîtres de l’Orge », scénarisée également par Van Hamme. On retrouve cette galerie de personnages entre aïeux et héritiers, ballotés par les évènements avec des hauts et des bas, certains nous « gratifiant » de turpitudes scabreuses histoire d’appâter le chaland… Le tout formant un récit ample mais inégal, avec des protagonistes plus ou moins attachants.
Finalement, la bonne surprise c'est le dessin de Philippe Berthet. D'une très grande élégance, il est étonnamment sobre : il ne s'embarrasse pas de détails, mais ça lui réussit plutôt bien. D'autant que son dessin est magnifié par les belles couleurs de Meephe Versaevel. Le tout donne un cachet certain à cette bande dessinée, qui est un ouvrage de qualité, c’est indéniable. Loin des préquels et suites dévoyant des séries phares et historiques, regrettable manie à laquelle nous ont habitué les grands éditeurs de BD.
Au total, c'est un album solide que nous offrent les deux auteurs, et on le referme en ayant envie de lire la suite, le pari est donc réussi. Pour autant, avec leurs talents combinés je me dis qu'on aurait pu avoir quelque chose d'encore meilleur, ce que laissait penser le début... Je me pencherai sans hésiter sur les deux prochains tomes et je verrai bien si Van Hamme a eu raison de reprendre la plume.
[2/4]