jeudi 10 novembre 2022

« Un conte de fées tchécoslovaque » de Christian Paigneau (2022)


 

    Un documentaire très intéressant et original, en ce qu'il fait se croiser les destinées de la Nouvelle Vague cinématographique tchécoslovaque et du scénariste Jan Procházka, qui d'artiste peu ou prou officiel et célébré par le pouvoir, deviendra de plus en plus contestataire, se mêlant (tardivement) aux jeunes cinéastes rebelles, hostiles au régime soviétique, qui accompagneront le Printemps de Prague... jusqu'à l'arrivée des chars.

L'angle d'attaque de ce documentaire est pertinent, avec cette mise en parallèle de deux trajectoires différentes, presque opposées, qui vont se retrouver, presque se côtoyer (mais pas totalement), dans cette défense de la liberté face à l'oppression, dans les années 1960. Un moyen de montrer ce que vivaient les intellectuels et les artistes sous le joug communiste, et par extension ce que vivait la société des pays derrière le Rideau de Fer. Une situation précaire et peu enviable, parfois même infernale dès lors que le régime vous avait dans son viseur...

J'ai toutefois deux reproches à émettre envers ce documentaire. Tout d'abord, c'est avant tout une biographie déguisée de Jan Procházka, les cinéastes de la Nouvelle Vague tchécoslovaque étant peu abordés, tout comme leurs films phares, même si les principaux sont cités. Réhabiliter, en un sens, Procházka me semble légitime, mais je suis resté sur ma faim... Il faudrait au moins 2 bonnes heures de documentaire dédiées au sujet pour traiter de façon décente le génie de la Nouvelle Vague tchécoslovaque, tellement riche et même passionnante.

Deuxièmement, ce documentaire regorge de magnifiques extraits de films tchécoslovaques, mais très peu voient leur titre et réalisateur mentionnés, on ne sait donc pas d'où proviennent toutes ces pépites... Dans le générique final, heureusement, tous les extraits sont cités, mais sans qu'on puisse les rattacher directement à ce qu'on a vu... Je trouve ça vraiment dommage, moi qui pensais découvrir de nouveaux longs métrages, je suis déçu...

Malgré tout, ce documentaire vaut vraiment le coup d’œil et il prouve que le cinéma tchécoslovaque mérite d'être redécouvert, tant il fut foisonnant, qualitatif et audacieux à son apogée.

[2/4]

mercredi 19 octobre 2022

« La Machine de Turing » de Benoît Solès (2018)

 

    J'avais un peu entendu parler de cette pièce mais de très loin, sans compter que je suis tout sauf un grand connaisseur du monde du théâtre, donc mes attentes n'étaient pas particulièrement élevées. Étant donné qu'elle se joue actuellement au Théâtre du Palais Royal, où se joue également « Edmond » d'Alexis Michalik, que j'ai vu récemment, je m'attendais à quelque chose du même ordre.

Et en effet, c'est très similaire. Du « boulevard plutôt qualitatif ». Mais du boulevard avant tout. C'est-à-dire des personnages et des dialogues très stéréotypés et caricaturaux. De l'humour bien lourd pour bien faire rire la salle en même temps... Avec, heureusement, une mise en scène qui fait le job. Rien de transcendant, mais la scène et les décors sont utilisés de façon astucieuse. Et une séquence émotion à la fin, touchante, certes, mais un peu forcée...

Avec un ami, on s'étonnait des affiches indiquant que la pièce a gagné 4 Molières, dont celui du Meilleur spectacle Théâtre Privé et d'Auteur francophone vivant ! Si c'est le summum du théâtre privé, il y a de quoi s'inquiéter un peu...

Alors certes, les deux comédiens se démènent, notamment celui qui joue Alan Turing, qui donne vraiment de sa personne et ne s'économise pas pendant la pièce. Je dois dire que même s'il en fait des caisses, j'admire l'énergie qu'il insuffle à son personnage pendant 1h30.

Mais la vie d'Alan Turing me semble plus complexe, plus intéressante et plus subtile que ce qu'en a fait l'auteur de cette pièce, Benoît Solès... Je précise que je n'ai pas vu le film « The Imitation Game », qui me tentait moyennement. Au moins cette pièce m'aura donné envie de le voir, pour en apprendre plus sur Turing et espérer découvrir une œuvre (je l'espère) à la hauteur de sa vie...

[2/4]