Un singulier portrait de Jean-Sébastien Bach, entre humour et gravité. Alexandre Astier revisite à sa sauce, et avec panache, la vie du Cantor allemand. Il a en effet écrit et interprète seul sur scène le spectacle. Et le moins que l'on puisse dire c'est qu'il est doué. Empli d'une énergie débordante, fin joueur de clavecin et de viole de gambe (Astier a suivi des études musicales au conservatoire avant de se tourner vers la comédie), l'auteur-interprète donne chair à son personnage, que l'on voit revivre sous nos yeux l'espace d'1h30. Certes, sa façon de se saisir de l'illustre Bach est un peu cavalière, assez triviale parfois, mais c'est l'occasion de rire aux éclats, à un rythme soutenu. Le langage employé est délicieusement anachronique, mais Astier respecte toujours son (anti)héros, un brin ronchon. En fait, il vulgarise la vie et l'art du compositeur allemand, avec simplicité et gouaille, mais toujours dans le souci de nous en faire apprendre davantage sur cette existence si particulière. On apprend les rudiments de la musique, on inspecte avec Bach un orgue vétuste... et l'on s'attriste de la perte de ses enfants. Car c'est là le versant sombre de Bach : sur la vingtaine d'enfants qu'il a eus, 10 mourront en bas âge. Et l'on sent le poids de la vie, pas toujours clémente pour lui, sur ses épaules. Ces moments plus versés dans l'émotion alternent avec les moments de création musicale ou d'enseignement, et c'est avec un grand talent scénaristique qu'Alexandre Astier jongle entre les registres et les scènes d'une chronologie non linéaire. A tous points de vue, « Que ma joie demeure » est donc une véritable réussite, un spectacle populaire dans le bon sens du terme, qui rend accessible à tous la musique la plus sophistiquée qui soit, avec bonheur qui plus est. Par ailleurs, le film du spectacle est bien réalisé, tout en sobriété, et met bien en valeur le jeu d'Alexandre Astier. Une façon originale et réjouissante de découvrir Bach !
[3/4]