mercredi 13 juillet 2011

« Baby Doll » d'Elia Kazan (1956)

    Grand moment de cinéma! Je n'ai pas le souvenir d'avoir déjà vu un film aussi virtuose d'Elia Kazan, qui nous livre là un sommet de mise en scène cinématographique. C'est bien simple, toute la force de son long métrage, son puissant érotisme, repose sur la suggestion des images, sur la construction du cadre, sur la lumière, sur l'écriture (Tennesse Williams est une fois encore formidable), bref sur les moyens du cinéma, sans jamais rien montrer de racoleur. Un tel film réalisé aujourd'hui tiendrait de l'exploit! D'ailleurs c'est bien simple, je ne crois pas qu'il ait été « dépassé »... Le récit monte lentement en puissance, installant une tension palpable toutefois dès les premiers instants, dans un delta du Mississipi à la chaleur harassante, et au son d'une musique presque lascive. En quelques plans, Kazan installe les personnages et les rapports de force voués à évoluer, dans une atmosphère moite et étouffante, propre à échauffer les esprits. On retiendra le jeu des acteurs, tous excellents et proprement inoubliables! Mais c'est une constante sous la baguette de Kazan, qui réussit comme à son habitude à les pousser jusqu'au bout d'eux-mêmes : Karl Malden par exemple, pourtant habitué de sa « troupe », réussit à nous donner le change en campant un personnage plus fort et ambivalent qu'à l'accoutumée. Mais n'oublions pas Eli Wallach et surtout la jeune et jolie Carroll Baker, à la fois détestable et fascinante femme-enfant. En somme, Kazan réussit une fois de plus à créer une oeuvre intense car violemment contrastée, bouillonnante, avec pourtant trois fois rien, sinon un grand talent de mise en scène, secondé par un fine sensibilité de peintre psychologique. Voilà un film qui redonne foi dans les possibilités du septième art, bien qu'il soit complètement à rebours de la tendance actuelle...

[4/4]

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