vendredi 25 avril 2025

« Anxious » de Nell Smith (2025)

 

« Anxious » est un album bouleversant, car posthume, réalisé par une très jeune artiste qui avait la vie devant elle... En effet, la talentueuse et prometteuse Nell Smith est décédée en octobre 2024, à seulement 17 ans, d'un tragique accident de voiture...

Elle avait été repérée par Wayne Coyne, le leader des Flaming Lips, groupe culte (pour moi le meilleur de ces 30 dernières années), lors d'un de leurs concerts, où Nell assistait déguisée en perroquet (sic). Les Lips et Nell avaient réalisé un album en commun, « Where The Viaduct Looms », où ils reprenaient des chansons de Nick Cave. Un très bel album, où la voix juvénile de Nell et la production des Flaming Lips et du génial Dave Fridmann faisaient des merveilles.

Depuis, Nell bossait sur son premier véritable album solo, « Anxious », qu'elle avait quasiment fini de réaliser au moment de son décès. Il est donc très étrange et émouvant de découvrir l'émergence d'une jeune artiste alors qu'elle n'est déjà plus de ce monde...

Le résultat est conforme à l'image que l'on se faisait de Nell : c'est un album juvénile, fragile, forcément imparfait, mais gorgé de belles idées, avec la voix de Nell davantage mise en valeur que sur son précédent opus, et une production maximaliste et réjouissante, ludique, sur laquelle a sans doute travaillé Dave Fridmann, le producteur du mythique son des Lips, car on reconnaît sa patte.

C'est un album vraiment qualitatif et réussi, qui se plage dans le sillage du célèbre groupe de l'Oklahoma, tout en traçant sa propre voie : on sent un style en devenir, personnel. Et l'on ne peut que regretter que Nell soit partie trop tôt, c'est un terrible déchirement pour ses proches et ses fans...

[3/4]

vendredi 18 avril 2025

« A Study of Losses » de Beirut (2025)


Un album de Beirut est toujours agréable, Zach Condon, l’homme-orchestre derrière ce groupe, étant un musicien talentueux. De plus, il a débuté sa carrière avec trois immenses albums, et cet artiste est attachant (il n’hésite pas à montrer sa fragilité, et il est un grand amoureux de la France et de l’Europe), il bénéficie donc toujours d’un grand capital sympathie en ce qui me concerne.

Cela étant posé, je dois bien dire que j'attendais cet album au tournant. Le précédent opus de Zach, Hadsel, m'avait déçu, par son ton éthéré et son manque d'inspiration. C'était un album à part, conçu dans le froid d'un endroit reculé de la Norvège, avec une esthétique visuelle et sonore complètement à part dans la discographie de Zach. Il avait un côté plus dépouillé : les cuivres, les nombreux instruments organiques et les boucles électroniques – véritable signature sonore de Beirut – étant beaucoup moins présents que d’habitude. Un vrai pas de côté, pas inintéressant, mais assez mineur.

Avec A Study of Losses, l'artiste américain reprend ses pochettes d'albums énigmatiques, invitant à la rêverie et au voyage. Je pensais donc que celui-ci se placerait dans la lignée de Gallipoli, un album inégal, mais qui voyait Beirut livrer un certain nombre d'excellentes chansons, au gré d'un album cohérent et homogène. Gallipoli faisait suite à No No No, un opus maudit, né dans la douleur et le syndrome de la page blanche, après un divorce et un éprouvant épisode de dépression.

Pourtant, je dois bien dire que je regrette même No No No, qui était encore plus inégal que Gallipoli, mais qui comportait certaines pépites. Dans A Study of Losses, je ne retiens que le single Caspian Tiger pour le moment, qui soit un minimum abouti et réussi. Le reste ressemble à une sorte de remplissage instrumental et ambiant, le tout formant une longue complainte qui fait du surplace…

18 titres, c'est ambitieux ! Mais encore faut-il avoir les moyens de ses ambitions... Ce n'est clairement pas le cas de Zach ici... Il y a trop de chansons monotones et répétitives, qui ressemblent à des faces B ou C de Gallipoli, ou de sa compilation Artifacts... On sent le soin apporté au son, mais les grandes absentes ce sont les mélodies, pourtant imparables par le passé, lors de l’âge d’or du groupe… Ici, Zach fait plutôt dans la ritournelle qui tourne en rond…

Je compte bien réécouter cet album, Artifacts avait été un « grower », peut-être en sera-t-il de même pour A Study of Losses... Mais j'ai tout de même des doutes. Artifacts balayait l'ensemble de la carrière de Zach, et par le passé il avait produit beaucoup de superbes chansons.

Aujourd'hui, il semble être l'ombre de lui-même, ce qui fait peine à voir... Ce fut un miracle que je puisse le voir en concert lors de sa tournée faisant suite à la sortie de Gallipoli. Ça a été un des meilleurs concerts de ma vie, mais depuis Zach en a annulé pas mal et ne semble pas prêt à revenir en France de sitôt, lui qui ne vit pourtant pas très loin désormais, à Berlin...

Une fois de plus, je ne peux donc qu'espérer que Zach se ressaisisse, et qu'il retrouve sérénité et inspiration... Il a en lui ce potentiel inouï, le tout est qu'il arrive à le laisser s'épanouir de nouveau...

[2/4]