La Nouvelle Vague aurait-elle trouvé en Akira Kurosawa l'un de ses plus
illustres prédécesseurs ? Car « Un Merveilleux Dimanche » annonce
indéniablement par bien des aspects les films des « jeunes turcs »
français : que ce soit par ses thèmes (le couple, l'errance, la
société,...), son esthétique, tantôt expressionniste tantôt moderne (et
même parfois surprenante d'audace !), toujours sublime, ou encore son
traitement : la journée d'un couple fauché dans un Japon d'après guerre,
tout simplement. Il faut dire que Kurosawa puise lui-même dans un autre
héritage marquant de la Nouvelle Vague : le cinéma français des années
30, et plus particulièrement le « réalisme poétique ». Toutefois l'art
de Kurosawa n'appartient qu'à lui, et il fait de ce long métrage qui ne
paie pas de mine au premier abord un magnifique moment de poésie,
affirmant une fois de plus le pouvoir de l'imaginaire humain (« Un
Merveilleux Dimanche » anticipe en un sens « Dodes'kaden ») et même de sa
mise en scène : une fois encore sa gestion du cadre, des mouvements, des
corps est proprement impressionnante sans jamais alourdir le propos,
simple mais touchant. Si la question financière délimite le cadre de
l'action (comment passer un dimanche à Tokyo avec 35 yens en poche?),
Kurosawa se focalise surtout sur le couple, ses hauts et ses bas, sur
les responsabilités ou les enjeux moraux qu'il implique... tout en
brossant en filigrane le tableau social d'une époque difficile, un peu
dans la veine du néoréalisme italien, autre de ses grandes influences. Si ce long métrage a été longtemps introuvable, il bénéficie aujourd'hui d'une édition DVD digne de ce nom, et ce n'est que justice !
Car il mérite largement sa place au sein de la filmographie du cinéaste
nippon : c'est tout sauf un film mineur. Une merveille de plus à mettre
au crédit de Kurosawa, à voir absolument !
[3/4]
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