lundi 29 octobre 2012

« Peter Ibbetson » d'Henry Hathaway (1935)

    Un film étrange, empli de mélancolie, et beau. C'est l'histoire d'un petit garçon et d'une petite fille séparés trop vite par la vie, d'un amour perdu à jamais inguérissable. Dans des décors intérieurs comme extérieurs somptueux, baignés par une photographie nuancée à l'extrême, se noue le drame de deux vies qui s'aiment à en mourir. « Peter Ibbetson » est une œuvre à mi-chemin entre le préraphaélisme et le surréalisme. Dirigée avec goût, la mise en scène réserve des moments d'onirisme pur du meilleur aloi. Tout n'est certes pas parfait dans ce long métrage, un peu maladroit, un peu surfait parfois. Mais son côté gauche et surtout sincère, presque naïf, est touchant. Gary Cooper excelle en jeune homme rongé par le passé. Ann Harding laisse moins affleurer une réelle humanité, son visage est quelque peu glacial, sa beauté est froide. Mais nos deux interprètes parviennent tout de même, de concert, à donner chair à cette histoire d'amour qui brave le temps et l'espace. On retiendra particulièrement le début et la fin du film, qui s'imprimeront durablement dans l'esprit du spectateur. Un des sommets du cinéma américain des années 30.

[3/4]

jeudi 18 octobre 2012

« Like someone in love » d'Abbas Kiarostami (2012)

    Quelque peu décevant. A l'aide d'une mise en scène sobre et d'un scénario simple mais ingénieux, Abbas Kiarostami nous brosse le tableau d'un Japon (mais ce pourrait être ailleurs) meurtri par la modernité. L'individualisme règne, tout comme la mélancolie ou la solitude, dans un décor bétonné et illuminé de néons, tandis que l'amour (digne de ce nom) est le grand absent. Comme à son habitude, le cinéaste iranien nous gratifie de pérégrinations en voiture. Soit. Chose bienvenue, quelques pensées profondes émaillent le long métrage, la plupart venant de la bouche du sympathique Watanabe Takashi, vieux professeur de sociologie. Ce dernier fera la rencontre de la jeune Akiko, prostituée de son état, et harcelée par son violent petit ami. Cette rencontre illuminera la vie de nos deux protagonistes, même s'ils n'auront pas le temps de faire plus ample connaissance et de vraiment s'apprécier. Et c'est là que la bât blesse. Kiarostami n'arrive pas à nous extraire de son spleen pour nous proposer une fable de l'acabit de ses meilleurs films. Il en avait pourtant la matière et les moyens, il avait de surcroît de bons interprètes. Il n'approfondit pas non plus son étude, trop superficielle, de la modernité. La fin brutale annihile tout espoir d'avoir affaire à une œuvre dense, et surtout de qualité. Le talent de cinéaste et de conteur d'Abbas Kiarostami n'est pas à mettre en doute, le long métrage est porté par son regard pudique sur une relation qui n'aura pas lieu, qu'elle soit corporelle, amoureuse, ou tout simplement humaine. Mais son achèvement soudain vient signifier l'impasse dans laquelle s'est engouffré Kiarostami. A trop vouloir jouer le réalisme, l'art de l'iranien a perdu de son sel et de sa saveur. « Like someone in love » est un long métrage inabouti, et c'est bien dommage.

[1/4]