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mercredi 31 août 2011

« La Piel que habito » de Pedro Almodóvar (2011)

    Un long métrage terrifiant! « La Piel que habito », s'il n'en a pas l'air au premier abord, est un véritable film d'horreur. La façon nonchalante dont Almodóvar y malmène le corps humain donne froid dans le dos, d'autant plus lorsque l'on sait que de telles opérations chirurgicales sont aujourd'hui réalisables! C'est là sa grande force : sa vraisemblance dans son extravagance délirante. Il s'agit en effet d'un film hautement obsessionnel et fétichiste (Almodóvar semble être un émule d'Hitchcock), et par ailleurs tout à fait décomplexé sur des thèmes quelque peu sordides, bravant les interdits sexuels les plus profondément ancrés dans l'imaginaire collectif pour mieux étourdir le spectateur, un peu comme dans le « Salo » de Pasolini. D'un autre côté, venant contrebalancer le scénario haut en couleurs, la sobriété voire l'académisme de la mise en scène, d'une froideur chirurgicale, se révèle fort à propos, permettant ainsi de donner vie à cette vision cauchemardesque de la science, et de rendre tout à fait crédible le personnage d'Antonio Banderas (bien qu'il reste volontairement schématique). Si le dernier long métrage d'Almodóvar lorgne par certains aspects du côté des « Yeux sans visage » de Franju ou du « Visage d'un autre » du japonais Teshigahara, il s'en éloigne toutefois en ce qu'il ne donne plus lieu à des interrogations métaphysiques sur l'identité et le « moi », mais provoque un malaise bien plus physique et inexprimable. Un sentiment de dégoût profond en somme, qui n'est pas étranger au franchissement de certaines « limites » que s'autorise Almodóvar, assez frontalement de surcroît. Il finit de la sorte par brasser beaucoup de choses, tournant cependant toujours autour de la sexualité (le désir, l'identité sexuelle, les traumatismes enfantins,...). Là ou le bât blesse, c'est dans la concision de l'ensemble. On rit parfois de bon coeur, et les personnages sont pour certains d'entre eux délicieusement incarnés, mais certaines séquences sonnent faux ou s'avèrent de trop, si bien qu'Almodóvar ne parvient pas à se hisser à la hauteur de ses références par sa trop grande trivialité. C'est là l'autre grand défaut de ce film en effet : son manque de retenue, son goût pour la surenchère (mais c'est ce qui fera son charme pour d'autres...). Pas mal de déjà-vu et de facilités donc, ainsi que des passages à vide qui l'empêchent de prétendre au titre de « grand film » pour lequel il semble concourir, en dépit d'une maîtrise formelle appréciable.

[1/4]