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vendredi 12 mai 2017

« Colonel Blimp » (The Life and Death of Colonel Blimp) de Michael Powell et Emeric Pressburger (1943)

    J’ai dû m’y reprendre à plusieurs reprises pour venir à bout de ce film. Je l’ai regardé en quatre fois, et je comprends ceux qui n’ont pas été séduits par ce long métrage, qui semble durer plus longtemps qu’en réalité. Et pour cause, Powell et Pressburger refusent toute dramaturgie excessive : pas de suspense, pas de surprise, pas d’action véritable. Tout est subtil, et l’ellipse est souvent de mise. En réalité, les deux cinéastes se concentrent sur la vie de notre héros et plus encore sur ses sentiments. L’éponyme Colonel Blimp est à la base une caricature, une sorte de vieille baderne à moustaches de l’armée britannique. Mais par leur talent, Powell et Pressburger en font un hymne au sens de l’honneur et au flegme britanniques, loin du prosélytisme qu’on serait en droit d’attendre de ce film originellement réalisé à des fins de propagande. En effet, le major-général Wynne-Candy, ridiculisé au début de l’histoire, se révèle profondément touchant quand on en apprend davantage sur son histoire. Son histoire se mêle d’ailleurs à la grande Histoire du Royaume-Uni et des guerres qu’il a menées au XXème siècle, de la guerre des Boers, en passant par le Première puis la Seconde Guerre Mondiale. En parallèle, on assiste à l’amitié de Wynne-Candy pour un soldat allemand du nom de Kretschmar-Schuldorff, cet amitié se révélant indéfectible malgré les évènements fâcheux qui opposent leurs deux pays. Et pour finir, Deborah Kerr illumine de sa présence le long métrage, en jouant trois rôles séparés dans le temps, incarnant une femme mystérieuse, au charme envoûtant et au cœur d’une histoire d’amour ratée, qui rend définitivement ce film et ses personnages terriblement attachants. Beaucoup de finesse et de nostalgie dans ce long métrage qui à mon sens reste l’un des tous meilleurs réalisés outre-Manche. J’avoue ne pas avoir été vraiment sensible au charme suranné du « Narcisse Noir », mais pour le coup j’ai été emporté par cette histoire au souffle fragile et délicat. Un très beau film, au Technicolor flamboyant, à voir jusqu’au bout pour en saisir toute la subtilité et la profondeur.

[4/4]

jeudi 30 juin 2011

« Le Narcisse noir » (Black narcissus) de Michael Powell et Emeric Pressburger (1947)

    Un film sensuel comme un bloc de marbre... Je ne peux m'empêcher de penser au « Fleuve » de Renoir, et comparer ces deux oeuvres, voire les deux « nations » qui se confrontent de cette façon : peut-on voir en ces deux longs métrages l'un britannique et l'autre français (du moins pour ce qui est de leurs réalisateurs respectifs) un bon aperçu des différences culturelles qui nous séparent? C'est peut-être un raccourci hâtif... Toutefois une chose est certaine, « Le Narcisse noir » est un film raide comme ses décors en carton pâte, froid car mécanique et artificiel, sans âme et sans passion. C'en est même fascinant tant chaque plan est savamment construit et élaboré par nos deux compères, sûrs de leur bon goût et de leur raffinement, tandis qu'à chaque fois un petit détail vient désamorcer le sérieux (hilarant malgré lui) du film : un arrière-plan tremblant dans des passages censés nous couper le souffle par leur cadrage vertigineux, un humour lourdingue, des nonnes d'un ridicule, un mâle, un vrai au torse velu, et trottinant sur un poney trop bas pour lui (inoubliable), des éclairages qui ne trompent aujourd'hui plus personne, des protagonistes écrits à la truelle, clichés au possible, une sorte d'histrionne édentée qu'on voudrait jeter du haut de la falaise factice du couvent... Bref, « Le Narcisse noir » est un monument d'académisme cinématographique, un film où tout est lisse et bien à sa place, mais qui n'a absolument aucune raison d'être. A vrai dire je ne suis guère étonné à présent que Powell ait pu « commettre » cet horrible film puritain qu'est « Le Voyeur » : c'est la même sensibilité si j'ose dire qui émane de ce film, baignant constamment dans un second degré trivial sous ses atours de  chef-d'oeuvre de magnificence et de psychologie. Un film assez bête il faut bien le dire, ou plutôt niais : voilà le mot qui convient le mieux au « Narcisse noir ». Je ne peux m'empêcher de songer à un autre film portant sur un sujet relativement similaire : « Mère Jeanne des anges », de Jerzy Kawalerowicz, autrement plus inoubliable! Et pour revenir enfin à la comparaison avec « Le Fleuve » de Renoir : ce dernier est non seulement passionnant, profond et formidablement émouvant. Mais il est aussi beau à chaque instant qui s'écoule. En dépit de sa photographie sophistiquée et de sa pompe orchestrée à grands coups d'archets hollywoodiens, « Le Narcisse noir » ne peut même pas en dire autant. Hélas, le « beau » cinématographique ce n'est pas seulement filmer de beaux décors et de beaux acteurs à l'aide de beaux cadrages...

[1/4]