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samedi 17 février 2018

« Taxi Téhéran » (Taxi) de Jafar Panahi (2015)

    Un film réjouissant et courageux ! Jafar Panahi reprend le dispositif formel que son compatriote Abbas Kiarostami avait mis en place dans « Ten » : une intrigue se déroulant principalement dans un taxi truffé de caméras, dont les allées et venues des différents clients – et leurs conversations – font tout le sel. Jafar Panahi est le conducteur et donc le principal acteur de ce long métrage, mais ce sont vraiment les personnes qu'il accueille à bord qu'il met en valeur. Pour autant, sa personne en est le reflet, et on en apprend tout autant sur la situation actuelle de l'Iran que sur Jafar Panahi. Notamment sur la poésie de son approche et de son art. Les différents protagonistes qui montent dans le taxi sont comme autant « d'idéaux types », mais dotés d'une personnalité propre, et éclairant à leur façon l'Iran d'aujourd'hui, à mi chemin entre tradition et modernité, entre liberté... et dictature. Les thématiques abordées sont nombreuses, de l'école à la justice en passant par la politique ou la société iraniennes. La profondeur de ce film est conséquente, mais la forme est tout aussi louable : en l'ayant simplifié à l'extrême, Panahi montre d'autant mieux l'intensité et la beauté de la vie et du monde qui nous entoure. J'ai trouvé beaucoup de plans très beaux, alors qu'ils sont tous presque anodins. L'art de Panahi est subtil, mais plus charnel que celui d'un Kiarostami, voire plus appuyé, surtout dans ses revendications politiques. Là où Kiarostami était passé maître dans l'art de jouer avec la censure, Panahi n'hésite pas à afficher les contradictions du système politique iranien et le dégoût qu'il lui inspire. Clairement Panahi ose, et je ne peux que craindre les représailles auxquelles il s'expose... Il faut donc louer la Berlinale, où il a obtenu l'Ours d'Or. Non il ne s'agit pas là que d'une récompense politique, car son long métrage est pour moi totalement réussi, mais oui, si l'on ne soutient pas ce genre de cinéastes engagés, personne ne le fera, surtout pas Cannes, qui préfère s'engager pour des causes sans intérêt et surtout sans danger... et encore, quand Cannes s'engage ! Il ne faut pas s'attendre à un film époustouflant sur la forme, c'est au contraire un film très simple et modeste, qui en déroutera plus d'un. Pour ma part j'ai été conquis par l'humanité, la finesse et le courage de Jafar Panahi !

[4/4]