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mardi 28 décembre 2010

« Kokoa » de Moustapha Alassane (2001)

    Excellent! « Kokoa » est le récit en direct d'un tournoi de lutte opposant crapauds, caméléons ou vautours, au milieu d'une foule d'amphibiens en délire! S'il s'agit encore une fois d'une oeuvre réservant plusieurs niveaux de lecture on se satisfera grandement du premier : comment ne pas être conquis par les bouilles des grenouilles d'Alassane! Et les commentaires maladroits du speaker sont touchants au possible, sans parler des divers rebondissements que réservent ces terribles combats! Qui sortira vainqueur du crapaud géant, de l'insaisissable caméléon ou encore de la coriace tortue? Le suspense est presque insoutenable! Il y a quelque chose de rassurant quand l'on regarde un tel film : oui il existe encore de vrais artistes, qui sans s'inquiéter de leur renommée, des honneurs ou des critiques prennent un immense plaisir à partager les fruits de leur imagination, de façon totalement désintéressée, avec pour seul souci de nous faire rêver. Oui de tels artistes sont encore de ce monde mais pour combien de temps? Alassane est le premier à être préoccupé par les générations futures et la transmission de sa passion : comment donner l'envie de créer à des enfants qui ne savent même plus ce qu'est une séance de cinéma en salle, qu'elle soit en plein air ou non? D'autant qu'il voit sa propre culture se déliter sous ses yeux, sans organes étatiques réellement capables de conserver et promouvoir l'art nigérien... C'est fort dommage, car les fables de Moustapha Alassane nous manqueront! Resteront ses charmantes petites histoires, telles « Kokoa »... L'art à l'état pur, d'une simplicité désarmante : un véritable régal!

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« Samba le Grand » de Moustapha Alassane (1977)

    Encore une petite merveille de poésie! Cette fois-ci nous voilà face à un court métrage d'animation réalisé à l'aide de marionnettes et de toiles peintes, une fois de plus créé de bric et de broc comme Alassane le dit lui-même. La façon dont il déjoue les convenances et les contraintes matérielles est proprement fabuleuse, il lui suffit d'un rien pour donner vie à des personnages légendaires et à des histoires merveilleuses! « Samba le Grand » est le récit des aventures d'un valeureux guerrier qui devra surmonter plusieurs épreuves pour conquérir le coeur d'une belle princesse. Et une fois de plus, sans parler de l'aspect touchant de ces marionnettes et de leurs mouvements gauches, le traitement de l'histoire est tout à fait original et inattendu. L'essence allégorique de ce court métrage est on ne peut plus manifeste, mais le conte de Moustapha Alassane se suffit largement à lui seul! Quel bonheur de se plonger dans cet art ancestral et pourtant d'un intérêt toujours d'actualité... D'autant que la musique qui l'accompagne est magnifique!

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« Le Retour d'un Aventurier » de Moustapha Alassane (1967)

    Depuis combien de temps n'avions nous pas assisté à l'expression d'un cinéma aussi libre, aussi vivant, aussi touchant par sa volonté de raconter par tous les moyens possibles une histoire? Peut-être depuis les débuts de Jean Rouch, de la Nouvelle Vague française, ... ou même de Robert Flaherty! Car l'art de Moustapha Alassane étonne par la modestie de son apparence : les « fautes » de raccord sont légions, la post-synchronisation n'a pas grand chose de synchronisé, les acteurs sont quelque peu maladroits... Mais ce ne sont pas à proprement parler des erreurs, puisque pour Moustapha Alassane il n'y a pas de règles de ce genre à respecter, du moins s'il met un point d'honneur à créer des œuvres de qualité ça n'est pas là qu'elle réside. Tout l'intérêt de ses films vient de l'imagination dont ils font preuve, de leur sincérité, de leur simplicité, de leur poésie, de leur richesse insoupçonnée et finalement de leur force intérieure. « Le Retour d'un Aventurier » nous conte le retour d'un africain de métropole, sa valise chargée de panoplies de cow-boys, revolver chargés y compris. Avec ses amis il se déguise donc, mais le jeu tourne rapidement à l'aigre et devient très vite funeste : des clans se forment et l'affrontement sera mortel pour plusieurs des jeunes inconscients. Alassane est friand de ces histoires, de ces paraboles plutôt, en apparence absurdes mais au fond tout sauf innocentes. Comment ne pas y voir la métaphore de l'Afrique revêtant les oripeaux de l'Occident et de la modernité pour son plus grand malheur? Au-delà de sa fraicheur formelle, de sa touchante ingénuité, un film terriblement lucide, parfait exemple du talent de son auteur.

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« Bon Voyage, Sim » de Moustapha Alassane (1966)

    Quelle joie de découvrir un artiste tel que Moustapha Alassane! En ces temps de tout numérique, de production cinématographique asservie par la 3D, gavée d'effets spéciaux, il viens nous rappeler que l'art ne se limite pas à la technique, qu'il a pour vocation et impératif de la dépasser! Son talent est protéiforme, s'adapte aux besoins du moment et aux matériaux qu'il a en sa possession : sa seule constante est de proposer des fables terriblement attachantes et épinglant sans en avoir l'air les travers de l'Afrique qui lui est contemporaine. Ainsi en est-il de « Bon Voyage, Sim », court métrage animé réalisé en 1966. C'est l'histoire du président d'une république de crapauds qui après un voyage officiel à l'étranger se voit évincé du pouvoir à son retour. Malheureusement après s'être lui-même censuré, Alassane n'a gardé que la partie « politiquement correcte » de son histoire, ce qui la rend quelque peu bancale et d'un intérêt moindre. Néanmoins l'on se contentera largement du coup de crayon du cinéaste nigérien et de ses amusants personnages!

[2/4]