« Les Amants Crucifiés » est l'un des derniers films du maître japonais
Kenji Mizoguchi, alors qu'il en a déjà réalisé presque une centaine :
son art est donc plus que jamais abouti, et il livre ainsi une mise en
scène d'un raffinement extrême. Tout en étant épurée de tous mouvements
superflus, elle se révèle d'une richesse incroyable, sublimant les
déplacements des personnages dans le cadre avec une grâce
extraordinaire. Pour ce qui est de l'histoire en elle-même, il aborde
une fois de plus la critique sociale en lui ajoutant une intrigue
tragique digne des plus grands mélodrames. « Les Amants Crucifiés » est en
effet l'occasion pour Mizoguchi de dénoncer l'horreur d'une société
féodale ultra-hiérarchisée et codifiée, étouffant les personnages et
leur humanité tout en faisant paradoxalement ressortir leurs plus grands
défauts, la cupidité en tête. Le dénouement tragique qui liera O-San et
son amant Mohei leur permettra au contraire d'atteindre le bonheur
absolu dans l'amour le plus pur, avant de devoir affronter la mort.
L'injuste société d'alors et sa loi inflexible, ces classes qui ne
peuvent se mêler, ces hommes ne vivant que pour l'argent ou le pouvoir,
tout cela conduira les amants proscrits à leur perte, irrémédiablement.
Pourtant leur amour triomphera de tout ce mal, d'une bien triste manière
certes, mais dans un refus total et exemplaire de tout compromis, dans
une plénitude presque sereine. Un chef-d'oeuvre d'une grande beauté.
[4/4]
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