Des grands noms de la bande dessinée actuelle pour une collection de courts métrages autour du thème de la peur, et pas seulement de la « peur du noir ». Toutefois le fait que ces six courts métrages se voient réunis sous cette même idée rend compte des limites du projet : rarement « Peur(s) du Noir » quitte les sentiers balisés du lieu commun. Charles Burns par exemple nous fait du Charles Burns (normal me direz-vous), seulement le doublage scolaire, le rythme lâche et l'animation moyenne ne viennent pas enrichir une façon de faire déjà originellement basée sur le cliché (du mal-être adolescent en l'occurrence)... Je n'étais pas un admirateur de Burns au départ même si je savais reconnaître son talent de dessinateur, pour le coup il aurait mieux fait d'éviter ce passage par le septième art. Marie Caillou nous livre un film d'animation lui aussi fort conventionnel, qui plus est trop limité à mon goût par sa technique d'animation qui le fait lorgner visuellement du côté d'une sorte de « South Park » arty (j'exagère à peine)... Ce sont les deux courts métrages les plus faibles il me semble, avec celui de Pierre Di Sciullo, plus original (des formes abstraites illustrent une voix-off débitant les angoisses du narrateur) mais guère plus convaincant (le propos verse lui aussi dans les généralités d'une certaine représentation « torturée » et surtout nombriliste de notre époque)... Le court-métrage de Richard McGuire n'est pas des plus surprenants, par contre sa maîtrise du noir et blanc est grande, et sa cohérence, son atmosphère restent tout le long d'une intensité appréciable, au contraire des deux premiers courts. Celui de Mattotti est « artistiquement » plus abouti, mais là encore il est loin de faire de l'ombre à son travail d'illustrateur BD, et si sa qualité est certaine il ne me laissera pas en revanche un souvenir impérissable. Le meilleur court métrage est à mon sens celui de Blutch, ça n'est d'ailleurs peut-être pas un hasard s'il est morcelé et intercalé entre ceux de ses confrères. Graphisme excellent, scénario excellent (loin du côté poussif et conceptuel des autres courts) : c'est une sorte de poème assombri par un humour des plus noirs. Attention ça n'est pas le court métrage du siècle bien sûr, mais au regard des autres courts de ce recueil cauchemardesque il se positionne clairement un cran au-dessus. Au final donc pas grand chose à retirer de ce « Peur(s) du Noir » ô combien inégal... Il est d'ailleurs assez désolant de constater que sur six auteurs présents, seuls deux ou trois possèdent une vision vraiment « adulte » de leur art, dans le sens où ils ne mettent pas seulement en images une simple collection de névroses « adolescentes » ou de fantasmes d'une banalité affligeante... Par ailleurs la musique-cliché-de-film-qui-fait-peur n'aide pas à porter le film vers des sphères débarrassées des conventions du genre. Une grosse déception donc, qui tient plus de la déclaration d'intention ou de l'exercice de style qu'autre chose.
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