Le Paris mythique des années 20, peuplé des grands noms de la peinture et de la littérature, vu par un New-Yorkais. Et bien… c’est désolant. Dans un Paris de cartes postales (on croirait certains plans extraits du Amélie Poulain de Jeunet), peuplé de touristes ultra-riches dont Allen nous dresse un portrait vaguement grinçant, déambule un écrivaillon américain, nostalgique d’une époque qu’il n’a pas connue, et qui voudrait refaire du Balzac. Chaque nuit, à minuit, dans un coin de rue, il franchit le temps et se retrouve dans le Paris des années 20, rencontrant dans le premier bar venu Dali discutant avec Buñuel et Man Ray, passant soirée après soirée en compagnie d’Hemingway, Picasso, j’en passe et des meilleurs. Au cours d’une de ces soirées, il rencontre une certaine Adriana, beauté mélancolique (oscar de la minauderie pour Marion Cotillard), amante et muse à ses heures des grands peintres de l’époque. Allen nous propose une visite dans un Paris imaginaire, sous forme de promenade dans le musée Grévin. Il enchaîne ainsi jusqu’à l’écœurement les exhumations de grands artistes, proposant des portraits se voulant caricaturaux mais en réalité se limitant à de grotesques tentatives d’imitations. C’est ainsi que Hemingway est présenté comme un rustre, voulant boxer le premier qui ne reconnaîtrait pas en lui le plus grand des écrivains, que Buñuel a l’allure d’un abruti incapable de comprendre le scénario de son propre film «L’ange exterminateur», que lui suggère notre écrivain de pacotille, que Dali pousse avec exubérance son accent anglo-espagnol (?) pour répéter interminablement son nom, tout en voyant des rhinocéros partout… Chacun de ces illustres artistes, portés par une interprétation dont les comédiens devraient être honteux, est ainsi allègrement tourné au ridicule, sans que la moindre lueur d’humour n’émane jamais de ce grand-guignolesque défilé, d’une crasse vulgarité. Ca en devient même très vite insupportable, car faute d'humour, c'est un sentiment de manque profond de respect qui émerge. Et tout ça pour quoi me direz-vous? Pour une morale surfaite, téléphonée dès les 10 premières minutes du film : il ne faut pas idéaliser une époque antérieure prétendue meilleure, chaque époque se vaut et il faut jouir du présent. Non seulement le propos est d’un cliché frisant le ridicule, mais Allen n’hésite pas à le sur-expliciter, histoire d’être sûr que tout le monde comprenne bien. En voyant «Minuit à Paris», on en vient plutôt à se dire que non, toutes les époques ne se valent pas, et que fut un temps, un certain âge d’or du cinéma (disons les années 60), où une telle daube aurait été l’occasion d’un lynchage en règle du soi-disant cinéaste l’ayant pondue, ou, à défaut, d’une méprisante ignorance. Mais Allen se croit moins conformiste qu’il n’est, et se la joue gentiment rebelle, en parsemant ici ou là son film de quelques piques politiques à destination des républicains américains (bouh les méchants Tea-Party, bouh les guerres de pétrole, bouh les riches pédants, vive la liberté et la démocratie, et vive la vie de bohême !). On appréciera la teneur du propos du cinéaste quand il fait tourner la femme du président français et ce grand défenseur du bouclier fiscal qu’est Gad Elmaleh… Le film s’achève sur une note d’émotion qui fera pleurer les minettes adeptes des guimauves édulcorées. Je crois bien que je viens de voir mon dernier Woody Allen... Consternant.
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