Une sorte de pâle remake avoué du
«Vertigo» de Hitchcock (avec également des clins d’œil nombreux à «Rebecca» et
«Marnie»), par un cinéaste spécialiste de cet exercice, et qui nous montre que
déjà, en 1976, le cinéma américain tournait en rond, incapable de se réinventer
ou de se questionner. Cette tendance s’est dramatiquement poursuivie jusqu’à
aujourd’hui, où il suffit désormais de regarder les films à l’affiche de nos
salles de cinéma pour se rendre compte que le cinéma américain ne produit plus
que des remakes, remakes officiels ou officieux, signe de sa mort clinique.
Donc après avoir vu le grand film d’Hitchcock en salles, De Palma, accompagné
de son scénariste, écrit une trame très proche de celle de «Vertigo» : un
homme perd sa femme de manière tragique et croit ensuite la retrouver quelques
années plus tard, tombant dans un piège machiavélique. Formellement également,
De Palma s’inspire très largement de l’univers d’Hitchcock, reproduisant
directement certains effets visuels du maître (comme le travelling circulaire
de «Vertigo» autour du couple), créant une ambiance feutrée par l’utilisation
abusive des flous et de la lumière diffuse (en respect aux règles formelles
très vilaines de l’onirisme hollywoodien) et en recrutant même le célèbre
compositeur attitré de Hitchcock, Bernard Herrmann. De Palma reprend tous les
ingrédients du film hitchcockien et réalise un film qui est comme un
surlignage, une mise en avant des quelques petits défauts du film originel, ici
totalement exacerbés. Si «Vertigo» n’est pas, à mes yeux, l’un des chefs
d’œuvres de Hitchcock (ça reste un très grand film toutefois), c’était déjà
parce qu’il s’agissait du film le plus hollywoodien du cinéaste, un film où
chaque émotion était soulignée à grands coups de musique pompeuse, où Hitchcock
se laissait aller, sans le recul ou même l’ironie qu’il prend ailleurs, à une
certaine mièvrerie sentimentale, donnant lieu à des scènes de romance assez
indigestes. Ici, chez De Palma, il ne reste plus que ça, il ne reste plus que
les défauts. «Vertigo» souffrait légèrement d’une musique trop appuyée? De
Palma inonde littéralement son film de la musique toujours aussi lourde de
Herrmann (ah ces grands envolées de cordes lorsque les personnages jouent à
bisou-bisou !...), si bien que l’on peut dire que celle-ci pollue
totalement le film. Trop de romance dans «Vertigo»? Ce n’est rien face au
sentimentalisme ringard de De Palma… On frôle très souvent le ridicule dans
«Obsession», et on fait même plus que le frôler avec la reprise du travelling
circulaire hitchcockien lors de la séquence finale dans l’aéroport. Si le
scénario de «Vertigo» était l’un des points forts du film, en étant
incroyablement ciselé et génialement tortueux, celui d’«Obsession» se
révèle très poussif, très peu crédible, bourré d’incohérences et en plus, ce
qui est dramatique pour un film qui mise lourd sur sa chute finale, totalement
prévisible. Ce n’est pas le jeu lamentable des acteurs qui permet de rehausser
le niveau, ni les effets de mise en scène pathétiques que le cinéaste tente de
multiplier, pensant peut-être qu’il suffit d’oser pour réussir là où Hitchcock
reste l’un des plus grands. «Obsession» est un petit film de rien du tout qui ne
peut en aucune façon être comparé à son illustre prédécesseur (de 20 ans tout
de même) et dont le titre ne traduit finalement que l’obsession d’un cinéaste
pour son maître. Une obsession cinéphilique qui se laisse regarder cependant dans ce qu'elle éveille en nous de mémoire cinématographique.
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