« Nostalghia » est peut-être, sans en avoir l'air, le film le plus douloureux d'Andreï Tarkovski, celui où se concentre de la façon la plus évidente toute la tension de l'existence humaine. Il n'y a d'ailleurs pas à proprement parler d'intrigue, il s'agit plutôt de la retranscription imagée de la vie, cette éternelle attente où hommes et femmes, fous et sains d'esprits, étrangers ou autochtones, tous aspirent à combler un manque, leur manque, et à embrasser l'infini. La nostalgie en est la manifestation même : ce sentiment indicible et ô combien ambivalent, à la fois autodestructeur et source d'un doux réconfort, peut-être par trop illusoire... « Nostalghia » est bien le long métrage de l'irréconciliable ambiguïté terrestre... Mais il propose un chemin à suivre, une réelle issue, pour qui sait l'entr'apercevoir. « Nostalghia » est l'oeuvre d'un artiste et d'un homme au soir de sa vie, une oeuvre pleinement aboutie, magnifique, exceptionnellement riche, celle d'un maître du cinématographe. C'est aussi l'oeuvre d'un homme qui a eu le loisir de contempler toute la vanité humaine, tous les faux-semblants dont l'humanité se pare et dans lesquels elle s'enfonce toujours davantage pour mieux s'y perdre. Au premier rang desquels l'on trouve cette insatiable soif de matérialisme, qu'il dénoncera de manière encore plus vive et efficace dans « Le Sacrifice ». J'ai été particulièrement surpris de découvrir une nouvelle facette d'Andreï Tarkovski avec ce long métrage, on l'y découvre un peu plus charnel, sensible (cette bande-son! ces couleurs!), un peu plus amer, un peu plus drôle, un peu plus serein... Et toujours cette petite lueur d'espoir au milieu de l'immensité du monde... Incroyable comme il parvient à simplifier son art, le rendre plus clair, plus limpide, et à la fois plus riche, encore plus profond et touchant... Bref, un chef-d'oeuvre de plus pour cet extraordinaire cinéaste.
[4/4]
Nostalghia est à mon sens le meilleur film de Tarkovski, et ta critique est probablement la meilleure que j'ai pu lire à son sujet. C'est un nouveau pan de son oeuvre qui apparaît ici en effet, on sent une réelle sérénité sur la pellicule, l'apaisement de celui qui sait. Et c'est ici que tous les enjeux du cinéma de Tarkovski prennent leur dimension la plus grande, la plus universelle. Cette métaphore de la vie de deux heures est une expérience de cinéma absolument magnifique, une expérience spirituelle et métaphysique qui change le spectateur à jamais...Les mots sont une fois de plus incapables de restituer la grandeur de Nostalghia, et en plus, tu as déjà tout dit. Un immense chef-d'oeuvre.
RépondreSupprimerAyant lu des critiques magnifiques sur ce film, je suis très touché par ton commentaire! C'est en effet un film exceptionnel, merveilleusement riche et subtil. J'ai une légère préférence pour « Le Sacrifice », que je trouve encore plus épuré et abouti, mais je te le concède volontiers, l'ampleur spirituelle et formelle de « Nostalghia » donne le vertige!
RépondreSupprimerPersonnage féminin "cliché" de femme mi-ange mi-démon, putain et victime, hystérique au possible et dont on comprend mal l'intérêt.....
RépondreSupprimerLe personnage féminin de ce film n'est pas en effet la plus grande réussite de Tarkovski. Heureusement, « Nostalghia » a d'autres qualités, mais il est vrai que c'est l'un de ses défauts, de ceux qui me font préférer « Stalker », « Le Miroir », « Le Sacrifice » ou même « Andrei Roublev » à ce dernier.
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