Dans la droite lignée d'« Antichrist », « Melancholia » est un film profondément désespéré, sorte d'anti-« Ordet » à tous points de vue. Tout dans ce film ramène l'homme à l'état d'erreur de la nature, transitoire et périssable sur la Terre (avec en plus cette noire ironie du danois qui ne laisse pas grand monde indemne)... On retrouve de surcroît la représentation de l'angoisse humaine qui parcourt toute la filmographie du cinéaste, et qui ponctue ici et là le long métrage à grands renforts de crises, pleurs et autres situations sordides. De ce point de vue, Lars von Trier est le digne héritier de Bergman et de son existentialisme tourmenté : il adopte une vision on ne peut plus crue sur la vie et parvient une fois de plus à tétaniser le spectateur sur son siège avec une histoire pourtant difficilement crédible sur le papier. Mais il ne l'égale pas à mon sens, d'une part parce qu'il n'a pas l'économie de style du cinéaste suédois, d'autre part car il ne parvient pas à dépasser ses obsessions sexuelles pour offrir des films plus profonds et plus riches. « Melancholia » est parfois inspiré visuellement parlant, mais les quelques plans savamment composés sont d'une laideur à faire pâlir n'importe quel photographe outré à la mode (et Dieu sait qu'il y en a). Le reste du temps, nous avons le droit à une photographie joliment éclairée, mais qui peine à se départir des canons publicitaires. L'interprétation quant à elle est appréciable, mais demeure sans réel éclat... Kirsten Dunst a reçu un prix d'interprétation à Cannes, ça devient une routine maintenant... On reste sur sa faim, et l'on commence à se dire que l'ami Lars n'a plus grand chose à dire, sinon qu'il se sent mal, et pour cela n'a pas de honte à nous le faire comprendre avec grossièreté et emphase... Bref, c'est kitch et dépressif au possible : Lars von Trier à au moins le mérite de tenter un nouveau mélange cinématographique, même si c'est peu dire qu'il ne lui réussit pas.
[1/4]
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